Etre convoquée par sa responsable qui vous annonce qu'elle a l'intention de poursuivre votre contrat jusqu'au mois de septembre au moins, avec pour condition de ne pas prendre de vacances durant les mois de juillet et d'août.

Etre intéressée. Parce que le boulot vous botte vraiment, que l'ambiance est pas mal, que vous bossez dans un quartier sympa, à une demie-heure de chez vous en métro, et que aimeriez bien finir par avoir un sac Léon Ventrerond.

Apprendre que vous, qui avez débuté au mois de décembre, avec un contrat misérable, on préfère vous conserver, plutôt que celle qui est là depuis le mois d'octobre avec un contrat un peu moins misérable[1], pour la simple raison qu'elle est un peu plus jeune, un peu moins autonome et un peu gaffeuse. La gaffe y z'aiment pas ça chez Léon Ventrerond. Pourtant, vous aussi êtes capables de gaffes, vous vous sentez parfois incapable de répondre à certaine demandes qui vous sont faite, et vous estimez finalement que vous ne valez pas mieux que votre jeune collègue.

Vous êtes bien embêtée pour votre jeune collègue. Surtout qu'elle s'imaginait déjà resigner à partir de la fin du mois de juin, pour une nouvelle période de 6 mois. Sauf que, la période de 6 mois, jusqu'à la fin de l'année, c'est à vous qu'on la propose. A mots couverts. Puisque pour l'instant ce ne serait que jusqu'au mois de septembre. Vous avez quand même un peu l'impression de voler le morceau de bifteack qu'un aussi nécessiteux que vous s'apprêtait à se mettre sous la dent. Autrement dit, vous avez mauvaise conscience. D'autant plus que la collègue en question n'est pas au courant de la situation.

Et pourtant. Vous acceptez le poste. Pour les raisons énumérées ci-dessus et puis, parce que aussi, c'est toujours ça de pris sur le compte en banque. Et puis bon... Faut bien l'avouer, hein. Con comme vous êtes... Vous espèrez secrètement être embauchée de manière un peu plus sérieuse à la fin de l'année.

Vous êtes un peu méprisable mademoiselle.

Notes

[1] Mais le mien est devenu honnête entre temps, moyennant une situation particulière et non moins précaire.